Le temps semblait s'être figé depuis que j'avais posé pour la première depuis de nombreuses années mes pieds sur le sol de la Nouvelle-Zélande. Ce monde que j'avais oublié, si différent mais pourtant si vivant à l'instant. Mon passé semblait me prendre d'assaut à chaque coin de rue, chaque boutique, chaque visage familier. J'avais l'impression d'être un étranger dans mon propre monde, et alors que je n'avais qu'une seule envie, celle de disparaître on avait besoin plus que jamais.
Je lisais sur leurs traits qu'ils n'étaient pas aussi heureux de me revoir qu'ils ne le laissaient paraître, je n'étais plus le petit Eden qui aidait aux cuisines... J'étais devenu Eden le top model, et la nouvelle semblait mal passer par ici. Je décidais alors de me noyer dans les complications administratives dues au décès de ma mère. Je ne réalisais pas encore qu'elle était disparue, que jamais je ne le reverrais. Qu'elle n'existais plus...
Rupture de contrat avec les banques, les compagnies d'électricité et de téléphone, réservation de l'église, place dans le cimeterre, invitation et faires-parts, fleurs, remerciement, adieux et encore remerciement. Tout semblait s'enchaîner alors que je sombrais sous les « toutes mes condoléances. » incolore, inodore mais surtout insipide...
Finalement, le jour-j – d-day – arriva beaucoup plus vite que prévu et déjà je me retrouvais dans un complet noir armani au premier rang de l'église de la capitale tout les yeux rivés sur moi. Je serrais quelques mains, le regard toujours dans le vide, puis m'asseyait enfin... C'est alors qu'on l'emmena, enfin si je puis m'exprimer ainsi, porter par des membres de la famille plus ou moins éloignés elle arriva à moi dans sa petite boite...
Le cercueil semblait si minuscule que je n'imaginais tout simplement pas comment il pouvait la contenir elle qui me paraissait si grande, si belle et disparue... Sans même que je ne m'en rende compte les premières larmes se mirent à couler le long de mes joues, d'abord discrète, elles ne tardèrent pas à se transformer en un flot complètement incontrôlable. Je sentais une main me frotter le dos, une ancienne amie de maman... Maman. Plus jamais je n'appellerais personne de la sorte, plus jamais je n'aurais l'occasion d'encore la serrer dans mes bras. Plus jamais, non, tout était finie.
Alors que mes joues étaient baignées de larmes, la cérémonie continua, imperturbable. Le prête prononçait des mots que je ne semblait pas à mène de comprendre, les gens défilèrent au pupitre et moi j'avais les yeux toujours rivés sur cette minuscule boite qui contenait maman. Une toute petite boite.
Après une demi-heure, peut-être une heure, nous dûmes quitter la « maison de dieu » pour nous diriger vers le cimetière dans une marche funèbre des plus morbides, moi à sa tête, moi l'orphelin... Le cercueil fut déposé dans un trou tout aussi minuscule, mes yeux toujours déçu alors que l'homme du seigneur articulait encore d'autre mot. Je sentais mes jambes faiblirent de plus en plus sous le poids de la tristesse qui semblait enfin me frapper de plein fouet. Mes yeux ne cessaient de pleurer et je me demandais un instant d'où toute cette eau pouvait bien provenir...
Nouvelles formalités, nouveaux serrages de mains, je ne voyais plus leurs visages... Je ne les avais d'ailleurs jamais vu. Jusqu'à ce que mes yeux se posent sur lui.